PENDULE DE SCHULER ET SYSTEMES DE NAVIGATION TERRESTRES

Rubrique introduite en mars 2012

 

I SCHULER ET SON PENDULE

Période de Schuler

Exemples saugrenus

II SCHULER ET LA NAVIGATION INERTIELLE

Historique

Question posée par Einstein

Le bouclage de Schuler

 

Cette page vient combler un vide ( qui m’a été fort justement reproché ) dans les rudiments de connaissance des centrales inertielles et de leurs applications à la navigation. Notamment de ne pas avoir mentionné le rôle de la "période de Schuler" incontournable pour un spécialiste de centrales de navigation terretres.

La raison: je me suis surtout intéressé à la mécanique spatiale et donc à la navigation inertielle dans l’espace et le cosmos, où ce qui compte ce sont des références absolues avec des centrales stabilisées 3 axes inertiels.

J’avais un peu oublié l’utilisation de la navigation inertielle au voisinage de la Terre, naturellement très importante pour les aéronefs  les sous marins ….qui eux utilisent des références liées à la Terre, bien évidemment.

Avant de commencer, pour les non initiés il est conseillé de voir | Centrale inertielle | Accéléromètre | Gyromètre |

I SCHULER & SON PENDULE?

Le docteur Maximilien Schuler est un physicien allemand qui, dans les années 20, s’est intéressé à la mise au point du gyrocompas en navigation maritime et notamment la minimisation des erreurs causées en mer par le roulis des bateaux. Ce faisant, la recherche et la réalisation mécanique de l’insensibilité au roulis, a fait apparaître une période d’oscillations libres du système de 84.4 mn environ, qui a été appelée depuis période de Schuler.

Dans ce qui suit, comme il est question de période associée à une oscillation harmonique, nous rappelons brièvement qu'une variable X  qui oscille avec une période T et une pulsation w vérifie une équation du type :

 

Typiquement 2 systèmes s'imposent : le ressort et le pendule simple intimement liés.

 

 

 

On dira souvent que -- w²X   est "la force de rappel élastique", s'opposant à la croissance de X.

1 -     Période de Schuler

 

Anticipons sur la suite pour dire que T = 84.4 mn est la période d’oscillation d’un pendule théorique, bien sûr irréalisable, avec un «  fil » de masse nulle, de longueur L égale au rayon terrestre R = 6378 km environ, oscillant dans le champ de gravitation ou de pesanteur régnant au niveau du sol, soit d’accélération g.

 

appelée PERIODE DE SCHULER

2 -     Quelques exemples "saugrenus" où cette période apparaît?

a)     Calcul  de la pesanteur à l'intérieur de la Terre:

 

Calcul classique de classe préparatoire, je renvoie le lecteur intéressé sur ce même site à la bonne rubrique .On y trouvera que la loi de variation de g est linéaire du centre au bord avec une valeur nulle au centre. La formule est présentée dans le croquis ci-dessous

 

b)     Le puits sans fond traversant la Terre :

 

Imaginons en oubliant la réalité de l’expérience, un puits tubulaire, rectiligne, sans frottement, traversant la Terre entre 2 points aux antipodes l'un de l'autre, et lâchons une masse sans vitesse en l’un des points A par exemple et regardons ce qui peut se passer!! C’est une chute libre, mais dans un champ de pesanteur variable, comme indiqué par la relation du dessin.

La loi de variation y est attractive vers le centre et linéaire en fonction de la distance au centre r. L'oscillateur est parfait et ne nécessite pas de petits déplacements.

La loi fondamentale de la mécanique donne en projection sur l’axe X

Le lecteur trouvera sans problème un mouvement sinusoïdal de période  égale à celle de Schuler, pour l’aller retour Aà B à  A

Etonnant !!!

c)       Le puits transversal :

Expérience analogue, tout aussi imaginaire, avec un puits tubulaire parfait, sans frottement, ne passant pas par le centre. On pose X= HM .

La force de rappel sur l'axe du puits est  f = F cosa = -Mgrcosa/R = - Mg X/R linéaire en X et donnant donc un mouvement harmonique parfait ( sans aucune approximation, ce qui est rare )

 

Le lecteur établira exactement la même équation du mouvement en projection sur l'axe  X , à partir de loi fondamentale. La conclusion est la même: le mouvement d'une masse M dans ce tube idéal est périodique sinusoïdal de période égale à celle de Schuler.

 

d)     A la surface de la Terre :

En extrapolant nos 2 études simples et en passant à la limite à la surface de la terre, on arrive aussi à retrouver cette période de Schuler, pour un mouvement dans un tube parfaitement horizontal au ras du sol, et là l'expérience est un peu plus réaliste, sauf que la lenteur de l'oscillation sera rapidement victime des frottements aussi petits soient-ils. Je laisse le soin au lecteur de faire le petit calcul.

 

e)     Avec un satellite gravitant au ras du sol

Il suffit de connaître la période orbitale pour une trajectoire circulaire de rayon R égal au rayon terrestre, pour conclure :

e) Pour faire le lien avec la navigation et la conservation de la verticale, on peut  interpréter le pendule de Schuler, mathématiquement parlant, en supposant qu'il ( le pendule ) est fixé au centre de la terre, que le fil a une longueur égale au rayon terrestre et qu'il se meut à une vitesse V constamment horizontale et égale à la vitesse orbitale au ras du sol, sous l'effet de 2 actions

-         Une jouant le rôle de la pesanteur c'est la force centrifuge

-         L'autre étant la tension du fil représentée par la pesanteur Mg

Ce faisant le pendule de Schuler est toujours strictement vertical et constitue un horizon artificiel parfait.

II SCHULER ET LA NAVIGATION INERTIELLE TERRESTRE

1 -     Historique :

Les allemands, avec notamment les travaux de Schuler et de son cousin Hermann Anschütz-Kaempfe, ont exploité les résultats  pour le guidage inertiel des V2. Plus tard c’est l’aéronautique et l’astronautique qui, à partir des années 60, mettrons au point nombre de systèmes inertiels de navigation.

Les systèmes qui font apparaître cette "période de Schuler" dans un mode vibratoire particulier sont dits « schularisés ». C’est le cas de nombres de dispositifs inertiels de navigation terrestre. On parle aussi de centrale de Schuler.

Profitons en pour revenir sur la notion de système inertiel.

2 -     Question posée par Einstein : Voir le cours dédié

Imaginons un véhicule totalement coupé du monde extérieur en ce qui concerne :

Les télécommunications

Les émissions d’onde de toute sorte ( électromagnétiques, acoustique etc....)

Donc ne pouvant rien émettre ni rien recevoir. Mais:

Autonome en énergie

Pouvant emporter tout type de connaissances ( disques, livres, CDROM,.mémoire informatique,..)

Pouvant utiliser tous moyens de calculs imaginables

Disposant de moyens expérimentaux de tout type, mais autonomes.

QUE PEUT-ON CONNAÎTRE DU MOUVEMENT CE VEHICULE ?

Précisons pour répondre par anticipation à cette question,  que la FORCE SPECIFIQUE est en un point de l’espace, est la différence entre l’accélération absolue et celle du champ de gravitation régnant en ce point de l’espace. Par exemple, dans le vide un corps tombant en chute libre est soumis à une force spécifique nulle. C’est une surprise de constater que dans le vide, isolé de tout, on ne peut pas mesurer le champ de gravitation par des moyens autonomes.

 

En d’autres termes, pour l’aéronautique par exemple, la force spécifique sur un avion est l’accélération crée par les forces autres que la gravitation ( aérodynamique et motorisation )

En astronautique, pour un lanceur en phase propulsée hors atmosphère, c’est l’accélération générée par les propulseurs. Dans le vide, sans poussée cette force spécifique est nulle.

REPONSE :

« PRINCIPE DE RELATIVITE DE GALILEE-EINSTEIN »

Il est possible de mesurer à bord du véhicule deux vecteurs :

 Le VECTEUR ROTATION INSTANTANEE du véhicule par rapport au référentiel absolu

  Le vecteur FORCE SPECIFIQUE f et rien d’autre.

 

3 - Comment exploiter la force spécifique ?

Sans entrer dans les détails, par ailleurs largement abordés  dans ce site, nous dirons que la méthode repose sur :

1 -   La mesure de la force spécifique, c’est une accélération, donc par un ou plusieurs accéléromètres

2 -   L’intégration mathématique de cette accélération, ce qui nécessite :

a - Un calculateur embarqué travaillant en temps réel.

b - Une détermination et mémorisation, en début de processus, des conditions initiales ( Vitesse et position initiales )  à phase appelée initialisation du navigateur

c - Un traitement des erreurs et la mise en œuvre de recalages périodiques.

L’ensemble s’appelle un NAVIGATEUR INERTIEL. Pour les lecteurs avertis, il s’agit des centrales inertielles.

4 - Exemple très simple

Imaginons un véhicule limité à un déplacement le long de l’équateur, au ras du sol et souhaitant connaître en continu sa vitesse V, sa position X, en toute discrétion, sans émettre quoi que ce soit  simplement en utilisant une source d’énergie embarquée et les ressources combinées de l’intelligence et de la physique.

En admettant qu’à l’instant du calcul, l’accéléromètre est parfaitement horizontal, il mesure donc suivant son axe sensible ( perpendiculaire à la gravitation locale ) la force spécifique soit g  =  F/M son accélération absolue.

Imaginons qu’il en soit toujours ainsi, alors la chaîne des calculs est très simple :

 

 
Où est le problème ?

Il repose sur la contrainte stricte de maintenir constamment l’axe de l’accéléromètre, exactement horizontal, alors que le véhicule se déplace le long de l’équateur terrestre.

Ce faisant dès que l’horizontalité n’est plus satisfaite, l’accéléromètre qui mesure, rappelons le, la force spécifique, voit donc apparaître la  gravitation par sa composante sur l’axe de mesure. Ce qui fausse l’accélération et par la même la navigation.

 

 

5 - Le bouclage de Schuler

Notre accéléromètre est monté sur une PLATEFORME INERTIELLE suspendue autour d'un axe de direction fixe, pour notre exemple simple, parallèle à l'axe des pôles

La plateforme comporte:

-         Un accéléromètre uni axe fournissant la force spécifique sur l'axe de mesure, soit l'accélération g si la plateforme est horizontale ou g - g sina si la plateforme est inclinée de l'angle a.

-         Un gyroscope mémorisant la verticale locale.

-         Une initialisation en vitesse et position

-         Un calculateur en temps réel, intégrant la force spécifique pour donner vitesse et position en utilisant l'initialisation.

Bien évidemment la navigation n'est correcte que si la plateforme est toujours strictement horizontale, d'où l'asservissement ou bouclage suivant.

Le moyen : Durant le mouvement, le calculateur fournit en continu la vitesse V du véhicule. Lors du déplacement horizontal, la plateforme asservie à la verticale gyroscope, n'est plus horizontale et a tourné d'un angle a , il faut donc imposer à la plateforme une vitesse de rotation w = da/dt, pour conserver l'horizontalité. Cet asservissement est réalisé par un moteur couple s'exerçant sur l'axe de suspension de la plateforme. Cette boucle de rétroaction s'appelle boucle de Schuler

Ainsi, en mode libre après dépointage, l'accéléromètre ne détecte que, qu'il interprète comme un mouvement :

L'asservissement en bouclage de Schuler impose

Finalement l'angle de dépointage a vérifie, en éliminant V

C'est précisément une oscillation harmonique à la période de Schuler, déjà citée plus haut

Conclusions : En fait la plateforme et le gyroscope de verticale sont mutuellement asservis l'un à l'autre, avec le bouclage de Schuler pour manœuvrer la plateforme et un moteur d'alignement du gyroscope gardant l'axe gyro normal à l'axe de mesure plateforme, pour suivre la verticale. Le gyro apporte dans cette affaire son inertie et la stabilité de la verticale.

C'est donc le calculateur qui maintient le système inertiel horizontal grâce au calcul de la vitesse, l'accéléromètre étant le révélateur du dépointage.

6 - Centrale de navigation terrestre :

Bien évidemment un navigateur terrestre nécessite une plateforme permettant une orientation dans le plan horizontal sur 2 axes, donc avec  un minimum de 2 accéléromètres etc…

Le lecteur pourra se documenter plus précisément sur le contrôle et l'architecture théorique d'une centrale : allez voir Avionique première de  Guy Mercier

GUIZIOU Robert , Mars 2012